Gérard Dine, lors d'une conférence de presse le 10 octobre 1998. Gérard Dine était conseiller scientifique de l'équipe cycliste Festina.
À quelques jours du lancement des Jeux olympiques de Pékin, un documentaire diffusé sur la chaîne allemande ARD montre avec quelle facilité on peut obtenir un traitement dopant à base de cellules souches. Sur les images, on y voit un docteur chinois proposer à un journaliste - se faisant passer pour un entraîneur américain de natation -, un traitement qui "renforce les fonctions pulmonaires" grâce à des "cellules souches" qui "vont dans le flux sanguin et atteignent les organes". Le tout contre une somme de 24.000 dollars.
Pour
lepoint.fr, Gérard Dine, hématologue, spécialiste du dopage et professeur à l'École centrale de Paris, livre son analyse. Il doute de la qualité génétique d'un dopage tel que le présente le documentaire. D'un autre côté, il insiste sur l'utilisation sans vergogne des biotechnologies afin de permettre aux athlètes d'améliorer leurs performances.
Lepoint.fr : Qu'est-ce donc que la thérapie cellulaire ?
Gérard Dine : Cela fait une dizaine d'années que l'on connaît le concept de cellules souches (des cellules qui peuvent se différencier ou se renouveler indéfiniment, NDLR), un concept qui permet de fabriquer du vivant avec du vivant. Pour faire une greffe de moelle osseuse, on a recours à des cellules souches de moelle osseuse. Des cellules souches peuvent aussi être utilisées pour faire des greffes de peau. L'utilisation dépend du type de cellule dont on a besoin : du tendon, du muscle ou de la peau par exemple. Ces thérapies existent aussi pour les sportifs : on les utilise pour améliorer la réparation des lésions du cartilage, cela coûte 15.000 dollars à peu près. C'est une société californienne qui le propose et ce n'est pas du dopage.
Lepoint.fr : Le documentaire allemand parle d'un renforcement pulmonaire à partir d'un traitement par cellules souches...
G. D. : Un tel traitement cellulaire (et non génétique) peut prendre différentes formes, il peut agir soit sur l'amélioration respiratoire, soit sur l'amélioration circulatoire du sang au niveau des poumons, soit sur l'amélioration de la captation de l'oxygène entre la partie respiratoire et la partie circulatoire des poumons. Parce qu'elle améliore les capacités respiratoires, une thérapie cellulaire peut donc être utilisée comme du dopage.
Lepoint.fr : Un dopage génétique est-il réalisable en l'état des recherches ?
G. D. : Je ne suis pas capable de dire si l'on dope actuellement des gens en utilisant des approches génétiques. Ce qui est sûr, c'est que 200 ou 300 équipes dans le monde travaillent sur des thérapies géniques qui peuvent avoir des déviations sportives. On peut imaginer que certaines thérapies pour les myopathes, où l'on modifie le plan de fabrication des cellules musculaires pour les rendre plus efficaces ou plus résistantes, puissent être déviées pour une utilisation dopante.